Le temps de travail est une donnée précieuse pour le salarié qui organise sa vie personnelle et familiale en fonction de son temps de travail, notamment de sa durée, de ses horaires et de sa répartition sur la journée, la semaine, ou le mois.
L’employeur ne peut donc pas, unilatéralement et abusivement, porter atteinte à cet équilibre.
- Les horaires de travail
Lorsque le contrat de travail comporte des dispositions explicites sur les horaires : dans ce cas, l’employeur ne pourra modifier unilatéralement l’horaire prévu au contrat, sans l’accord exprès du salarié (Soc., 9 mars 2005, n° 03-41.715, Soc., 10 avril 2019, n° 17-28.427).
Si rien n’est précisé dans le contrat de travail et que rien ne laisse apparaître que l’horaire de travail est un élément essentiel du contrat de travail, l’employeur pourra, sous réserve de ne pas porter une atteinte excessive et injustifiée au droit du salarié, modifier les horaires de travail de celui-ci (Soc., 14 décembre 2016, n° 15-21.363).
- La durée de travail
La durée de travail est en principe contractuelle.
Cependant, depuis 1961, la Cour de cassation admet, par exception, que l’employeur dispose du pouvoir d’ordonner aux salariés la réalisation d’heures supplémentaires sans que ceux-ci ne puissent les refuser.
Ce pouvoir unilatéral est toutefois limité.
D’une part l’employeur doit respecter la règlementation des heures supplémentaires et d’autre part, la Cour de cassation affirme qu’au-delà d’un certain nombre d’heures, dès lors que celles-ci deviennent systématiques, l’exigence de l’employeur s’analyse en une offre de modifier le contrat de travail, offre que le salarié peut refuser.
L’employeur peut donc, unilatéralement, mais dans une certaine mesure, augmenter la durée de travail du salarié, par le biais des heures supplémentaires.
En revanche, la baisse de la durée de travail, dans la mesure où elle conduit à une réduction du salaire est en revanche nécessairement une modification du contrat de travail même si elle est minime (Soc., 24 mars 2004, n°02-45.130; Soc., 15 juin 2016, n° 14-29.985)
Cette solution connaît toutefois une exception : l’employeur peut imposer à ses salariés une mise au chômage partiel à la condition de rester dans le cadre du chômage partiel indemnisé (18 juin 1996), et ce, même si cela se traduit pour eux par une perte de salaire.
- La répartition du temps de travail
Si, en principe, la répartition du temps de travail relève du pouvoir de direction de l’employeur, bien des exceptions ont été élaborées par la jurisprudence qui décide, de manière constante qu’un employeur ne peut imposer au salarié une modification de ses horaires de travail si ce changement emporte des bouleversements importants pour celui-ci.
Il en va notamment ainsi pour :
- le passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit (Soc., 25 juin 2014, n° 13-16.392, Soc., 16 janvier 2019, n° 17-23.337);
- le passage d’un horaire fixe à un horaire variable (Soc., 28 mai 2014, n° 13-10. 619);
- le passage d’un horaire continu à un horaire discontinu (Soc., 23 septembre 2014, n° 13- 16.257);
- le passage d’un horaire discontinu à un horaire continu (Soc., 6 juillet 2004, n° 02-44.331);
- toute modification qui porte « atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale ou à son droit au repos» (Soc., 10 décembre 2014, n° 13- 13.644; Soc., 12 janvier 2016, n° 14-21.439 ) ;
- ou est motivée par la seule volonté de nuire au salarié (Soc., 12 mars 2002, n° 99-46.034).
La Cour de cassation a ainsi censuré le raisonnement des juges du fond ayant retenu que dès lors que le changement des horaires n’avait eu aucune conséquence sur la durée de travail et la rémunération de la salariée, il s’agissait d’un changement de ses conditions de travail et donc, relevait du pouvoir de direction de l’employeur.
Or, la Cour de cassation a considéré qu’« en statuant ainsi, alors qu’elle a constaté que l’employeur avait imposé à la salariée le passage d’un horaire continu à un horaire discontinu, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé » (Soc., 3 novembre 2011, n° 10-30.033 ; dans le même sens ; Soc., 24 avril 2013, n° 11-23.759).
La Cour de cassation a en revanche approuvé le raisonnement des juges du fond qui ont décidé qu’« en remplaçant un horaire libre par un horaire fixe », l’employeur « avait modifié le contrat de travail et que le refus de cette modification par la salariée ne constituait pas une cause de licenciement » (Soc., 12 décembre 2000, n° 98- 44.580).
L’employeur ne peut pas davantage imposer au salarié, sous peine de licenciement, une modification de ses horaires de travail lorsque celle-ci emporte « atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale ou à son droit au repos » (Soc., 3 novembre 2011, n° 10- 14.702 ; Soc., 12 janvier 2016, n° 14-21.439 ; Soc., 10 décembre 2014, n° 13- 13.644) ou est motivé par la seule volonté de nuire au salarié (Soc., 12 mars 2002, n° 99-46.034).La Chambre sociale de la Cour de cassation considère que l’employeur ne peut modifier la répartition du temps de travail d’une salariée, lui allouant non plus tous ses mercredis, mais un mercredi sur deux, puisque celle-ci avait informé qu’elle était divorcée et avait la garde de ses enfants chaque mercredi (Soc., 12 mars 2002, n° 99-46.034).
De même, un chauffeur de taxi, lors de l’embauche, avait excepté son emploi par que son horaire de travail, fixé de 7 heures à 17 heures, était compatible avec ses obligations familiales : son employeur, 5 ans après l’embauche, l’affecte à un service où l’horaire est de 10 heures à 20 heures. La décision unilatérale de l’employeur a donc modifié un élément essentiel du contrat (Soc., 22 mai 1975).
La jurisprudence réintroduit ici le critère de l’importance de la modification puisque les modifications dans la répartition des horaires du salarié sont permises sauf atteinte trop importante portée à sa vie privée et familiale.
Concernant un salarié à temps partiel, il est également acquis que la répartition de ses horaires de travail est contractuelle de sorte qu’elle ne peut être modifiée sans son accord.